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Philippe Nemo au Centre Jean Gol à Bruxelles

Philippe Nemo au Centre Jean Gol à Bruxelles Posted on 1 mai 20163 Commentaires

Le Centre Jean Gol, centre de réflexion au service de la pensée et de l’action libérales, accueillait vendredi à Bruxelles, dans le cadre de sa série de conférences consacrées aux « Fondements de la société européenne », le philosophe et historien des idées politiques français Philippe Nemo, auteur notamment d’une histoire en deux tomes de la pensée politique de l’antiquité à nos jours et de l’essai Qu’est-ce que l’Occident ?. Ce remarquable ouvrage de synthèse sert de fil rouge à la série de conférences. Après de précédents exposés sur les influences de la Grèce antique et de Rome sur le développement de l’Occident, il revenait à Philippe Nemo d’en examiner les racines chrétiennes au travers de l’influence de la bible et des papes du XIe au XIIIe siècle.

Dès lors qu’aucune autre civilisation ne paraît avoir fait le projet du progrès indéfini comme moteur de l’humanité, Philippe Nemo formule l’hypothèse que la civilisation occidentale le doit à un apport spécifique, à savoir le judéo-christianisme, sa morale d’amour et de compassion (s’inspirant de la parabole du Bon Samaritain) et sa rébellion contre la normalité du « mal » qu’il convient d’extirper (« to root out evil ») en transformant le monde. Ce projet était susceptible de se manifester sous des formes différentes, violente (le grand soir du massacre des méchants avant l’avènement d’une aube nouvelle) ou non-violente (la conversion de l’agir humain par la rationalité du Droit et de la Science).

C’est là qu’intervient le miracle (au sens de phénomène non nécessaire dont l’on ne pouvait prévoir la survenance ni l’expliquer a posteriori) de la « Révolution papale » des XIe au XIIIe siècles. Alors que sous la féodalité l’Europe connaissait le déclin, démographique, matériel et moral, les hommes du « parti papal » eurent l’intuition de transformer le monde afin d’en réaliser les fins éthiques et eschatologiques et, pour ce faire, de mettre à l’avant-plan l’agir humain en donnant à l’homme le moyen de connaître le monde et d’interagir avec ce dernier et ses semblables dans un cadre pacifique et efficient. Science et droit retrouvèrent le rôle fondamental que la science grecque et le droit romain remplirent dans les étapes précédentes du développement de l’Occident et qu’ils joueraient dans l’apparition des réformes libérales et démocratiques qui transfigurèrent le monde occidental et lui conférèrent son éclat moderne.

Dans la séance de questions et réponses qui suivit l’exposé, se posa immanquablement la question de l’intégration de l’immigration musulmane en Europe. Philippe Nemo y répondit par une allégorie avant de formuler une suggestion et un avertissement. « Quand vous souhaitez accueillir quelqu’un, vous ne le faites pas dans un hall de gare impersonnel mais chez vous, où il verra comment vous vivez et pourra mieux vous connaître et vous apprécier. » Aussi préconise-t-il d’enseigner aux nouveaux-venus les valeurs cardinales de l’Occident au travers de l’histoire de son développement et de l’importance de son héritage chrétien dans ce dernier. (L’Europe connut d’ailleurs sous la « Révolution papale » un essor démographique et économique qui la vit décoller par rapport aux civilisations – Islam, Chine, Inde – qui jusque-là lui avaient été égales voire supérieures.)

C’est, selon Philippe Nemo, le contraire qui se passe en France où la « secte laïciste » au pouvoir cherche à imposer sa propre religion et profite de chaque occasion et notamment de la connotation religieuse des derniers attentats sanglants pour éradiquer toute trace du christianisme alors que ce dernier n’a rien à voir dans cette abomination. En outre, fait-il remarquer, si les terroristes ayant perpétré ces attentats ne sont pas issus de l’enseignement chrétien, ils ne le sont pas plus de l’enseignement islamique, mais bien de l’école laïque. A force de dénigrer le sens de l’absolu, conclut-il, l’on incite la jeunesse à lui substituer une adhésion à des dogmes d’un tout autre ordre.

Le mot de la fin appartint à Corentin de Salle, lui aussi philosophe, qui, après avoir annoncé les prochaines conférences au programme du Centre Jean Gol dont il est le directeur, rappela cette boutade biblique de Margaret Thatcher : « Personne ne se serait souvenu du Bon Samaritain s’il n’avait eu que de bonnes intentions. Il avait aussi de l’argent. ». Une société qui cloue au pilori ses Bons Samaritains (les « riches » pikettysés d’aujourd’hui) et en fait les victimes expiatoires de son impotence économique et de son indigence intellectuelle ne se condamne-t-elle pas à une régression au stade archaïque d’organisation sociale dont la « Révolution papale » lui avait précisément permis de s’émanciper, comme l’expliqua le Professeur Nemo ? Car toute philosophie serait vaine si elle faisait abstraction de la praxis, gageons que l’orateur chargé de parler au Centre Jean Gol de l’émergence du libéralisme intellectuel et économique comme cinquième « miracle » de la morphogenèse de l’Occident ne manquera pas d’aborder le thème éminemment actuel et politique de la création et de la répartition des richesses.

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