Le livre de l’ex-secrétaire d’Etat belge à l’Asile et la Migration, Theo Francken, co-écrit par Joren Vermeersch, Continent sans frontière, mérite d’être replacé dans son contexte historique qui remonte à la formation du gouvernement fédéral belge au lendemain des élections législatives de mai 2014. La N-VA, l’alliance nationaliste flamande, à laquelle appartient Theo Francken, en sortit victorieuse, largement le premier parti de Flandre au niveau régional et de Belgique au niveau national.
Craignant pour sa participation au pouvoir et pensant se rendre incontournable dans les tractations au niveau national (« fédéral », dit-on en Belgique), le Parti socialiste (francophone), en perte de vitesse à tous les niveaux, précipita la formation des gouvernements régional wallon et communautaire francophone sur base d’une majorité socialiste-démocrate humaniste (anciennement sociale chrétienne) PS-CdH.
La manoeuvre fit long feu et incita le Mouvement réformateur (tendance libérale) à entrer comme seul parti francophone dans un gouvernement fédéral constitué pour le reste de la N-VA, du CD&V (parti démocrate chrétien flamand) et de l’Open VLD (parti démocrate libéral flamand) et à s’octroyer tous les portefeuilles ministériels dévolus aux Francophones au sein du gouvernement linguistiquement et constitutionnellement paritaire au niveau fédéral, même si, en l’occurrence, le MR francophone ne pesait que 20 sièges et les trois partis flamands de la majorité parlementaire, un total de 65 sièges, pour une majorité à la Chambre des représentants de 85 sièges sur 150.
C’est sous les cris d’orfraie, virant parfois à l’hystérie, en particulier du côté du PS, des rangs duquel était issu le précédent Premier ministre, qu’eut lieu l’investiture de la nouvelle majorité (dite « suédoise », en raison du fait que les couleurs des partis de la coalition correspondaient à celles du drapeau de la Suède). Malgré des grèves violentes dont il eût été difficile de nier le caractère politique, la nouvelle coalition tint bon, jusqu’à quelques mois de la fin de la législature et la démission des ministres de la N-VA, ce parti refusant de cautionner la signature du pacte migratoire de l’ONU, dit « Pacte de Marrakech ».
Entre-temps, le jeune secrétaire d’Etat, entré au gouvernement en 2014 à l’âge de 36 ans et précisément en charge de ce dossier, Theo Francken, est devenu l’homme politique le plus populaire de Flandre et l’un des plus populaires de Belgique, n’en déplaise à ses détracteurs de l’opposition et aux médias. C’est en effet souvent sur lui qu’ils se déchaînèrent, allant jusqu’à l’injurier et, un parti, jusqu’à diffuser un montage photographique de lui affublé d’un uniforme nazi, sans jamais lui en présenter des excuses.
Il faut dire que le pragmatique Monsieur Francken, qui s’est lancé en politique sans qu’aucun membre de sa famille ne l’y ait précédé, ne cache pas son manque total de sympathie pour les dogmes socialistes et écologistes et la mythologie « écocolopoco » d’une manière générale. Il s’en explique dans son livre Continent sans frontière, paru à la fin de l’année dernière et déjà vendu à plus de dix mille exemplaires dans ses versions en néerlandais et en français (une version anglaise est à l’étude).
« Jamais, écrit-il, les défauts et l’injustice fondamentale du modèle migratoire européen n’ont été aussi évidents que depuis et après la crise migratoire de 2015 ». Et, la crise migratoire reste présente et elle s’amplifie. En effet, si l’afflux de plus d’un million deux cent cinquante mille demandeurs d’asile pendant l’année 2015 fut présenté par certains milieux politiques et les médias comme une « crise de réfugiés » fuyant la guerre en Syrie, en fait, seul un peu plus d’un quart de ces demandeurs d’asile au niveau européen étaient syriens et, encore, une majorité d’entre ces Syriens n’arrivaient pas de Syrie mais d’autres pays dans lesquels ils s’étaient établis depuis plusieurs années.
Il ne s’agissait donc pas d’une soudaine crise de réfugiés de guerre, mais bien d’une crise migratoire dont les prémices dataient de bien auparavant et qui ne cesserait pas subitement. Dans Continent sans frontière, Theo Francken tente, en cinq chapitres, d’en exposer les facteurs, tant à l’intérieur de l’Europe qu’à l’extérieur (économiques, culturels, démographiques, climatiques), les risques pour la zone Schengen et l’avenir de l’Union européenne ainsi que les solutions pour y remédier.
Nous reviendrons aux développements et aux conclusions de ce livre édifiant et non passionnel de Theo Francken dans un prochain article, car il est évident que les enjeux de la crise migratoire seront au coeur des préoccupations lors des prochaines élections européennes au niveau de notre continent ainsi que des élections législatives en Belgique.
Continent sans frontière, Theo Francken (avec Joren Vermeersch), 312 pages, Editions Jourdan. (Photo : Page Facebook de Theo Francken)
(A suivre)
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