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Dettes publiques et répression financière

Dettes publiques et répression financière Posted on 18 mars 2014Laisser un commentaire

Le FMI s’est prononcé en faveur d’un prélèvement « unique » sur l’épargne des particuliers afin de rembourser les dettes publiques. « Enfer et damnation, nous sommes faits! » C’est pourtant logique, expliquent Bruno Colmant et Jennifer Nille dans Dettes publiques : un piège infernal, puisque les citoyens sont tout à la fois les créanciers (directs ou indirects) et les débiteurs de la dette publique d’un Etat. Que cette osmose oblitère la notion de propriété privée et rompe avec la démocratie, Marx ne l’a-t-il pas lui même suggéré en prônant en matière de répression financière la confiscation de la propriété privée pour résorber la dette publique?

La crise est devant nous, préviennent les auteurs de cet ouvrage remarquable de concision et de complétude. En plus de la valeur nominale de la dette qui dépasse déjà une année de PIB, il faut tenir compte d’une dette latente résultant du vieillissement de la population (pensions et soins de santé) qui n’est pas factorisée dans la dette nominale et qui va progresser de manière géométrique, sans qu’aucune solution structurelle n’ait été trouvée. Cette architecture repose sur de mauvaises fondations, écrivent encore Bruno Colmant et Jennifer Nille : au lieu d’individualiser les contributions de chaque citoyen, non seulement l’on a collectivisé le système, mais encore l’on en a repoussé le financement! Et, lorsqu’une dette devient importante, ce ne sont plus les créanciers qui obligent leurs débiteurs, ce sont ces derniers qui imposent à leurs créanciers des restructurations et des effacements.

A moins d’opter pour une approche marxiste (ce qui est apparemment le choix du Parti Socialiste en Belgique au vu de son programme électoral), la relance et la croissance de l’économie devraient être le seul objectif de dirigeants politiques éclairés, sans que l’on ne doive nécessairement opposer ces notions à celles d’austérité et de rigueur budgétaire comme semblent pourtant le faire les auteurs. Or, adossée à des systèmes rigides d’asservissement social, l’Europe n’affiche pas la résilience des Etats-Unis. Elle est tragiquement en panne de croissance. La Belgique, en particulier, est fatiguée et amoindrie par ses coûteux déchirements internes et dévoiements institutionnels. C’est pourquoi de nombreux jeunes voient leur avenir ailleurs. Ancrée dans le passé, la classe politique se montre incapable de penser l’avenir et d’insuffler l’optimisme.

« Nous les hommes politiques nous savons très bien ce qu’il faut faire, disait un ancien Premier Ministre européen. Mais ce que nous ne savons pas, c’est comment être réélus si nous le faisons! » Cynisme, clientélisme et carriérisme débouchent sur la tentation collectiviste d’exercer sur les plus prudents ou les plus avisés des citoyens une répression financière qui consiste à les spolier, d’une manière ou d’une autre, des fruits de leur épargne. Dévaluation et inflation sont historiquement les instruments de désendettement les plus souvent retenus par les Etats (Weimar, Argentine, Russie). Mais, comme l’ont montré les exemples de l’Irlande, de la Grèce ou de Chypre, l’adoption de la monnaie commune a singulièrement compliqué la donne en Europe et a donné lieu à l’administration de remèdes moins conventionnels et moins indolores qu’une dévaluation ou un intérêt réel négatif limités à quelques pour cent.

Le seul remède équitable à la crise monétaire, aux déséquilibres sociaux et à la sinistrose ambiante en Europe serait de restaurer la croissance en encourageant l’esprit d’entreprise et en libérant, pour ce faire, le marché du travail des carcans dans lesquels l’ont enfermé ceux dont la raison d’être et les prébendes dépendent objectivement de l’immobilisme en matière sociale. « Une véritable politique de l’offre » : c’est l’hypothèse, la seule salutaire et la moins stupide dit-il, avancée par le philosophe Luc Ferry dans une lumineuse chronique publiée par Le Figaro (13.03.2014), pour mettre les actes en accord avec le changement. C’est aussi l’une des pistes de réflexion évoquées par Bruno Colmant et Jennifer Nille dans Dettes publiques mais avec tant de précautions oratoires que l’on en vient à douter qu’ils y croient vraiment. De fait, avec aussi peu de membres du personnel politique ayant jamais créé ou dirigé une entreprise voire simplement travaillé dans le secteur privé, ce serait croire aux miracles que de s’attendre à ce qu’ils prennent de vraies mesures de relance économique, encouragent l’entrepreneuriat et restaurent la confiance. A cet égard, la mise en place du statut unique ouvriers-employés en Belgique ne constitue-t-elle pas l’exemple même de l’occasion ratée pour ce qui est de la flexibilité et le démenti de toute velléité de palingénésie ?

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