Le remède est-il pire que la maladie ? Les mesures de confinement et autres en réponse à la propagation du coronavirus SARS-CoV-2 sont-elles disproportionnées ? La question avait déjà été soulevée en filigrane par Palingénésie lundi dernier. Elle se posera avec d’autant plus d’acuité dans les semaines à venir si le confinement social perdure et les conséquences économiques s’aggravent.
L’étude d’une société de recherche économique et d’investissement réputée, dont un vent favorable a permis à Palingénésie de prendre connaissance, estime que le remède est coûteux, mais nécessaire, et que des politiques adéquates devraient faire en sorte que la situation évolue d’ici la mi-mai, voire plus tôt.
L’Europe et les États-Unis ont perdu un temps précieux avant de reconnaître la gravité de la situation et entretemps le virus s’est répandu de manière telle que l’approche bon marché de la Corée du Sud et de Singapour ne constituait plus une option. Les experts en santé publique, dont la tâche consiste à prêcher la précaution, sans en prendre en compte le coût économique, ont appelé à un verrouillage à la chinoise afin de ne pas répéter à plus grande échelle encore les débâcles de Wuhan et du Nord de l’Italie.
Il est désormais hors de propos, poursuit l’auteur de l’étude en question, d’ergoter sur les mérites du confinement social, puisque la plupart des gouvernements des pays riches et un certain nombre de pays en voie de développement, comme l’Inde, ont choisi cette option. Le lockdown est en place et la seule question immédiate est de savoir comment le gérer au mieux.
Il serait, en outre, périlleux d’ignorer les mathématiques de la croissance exponentielle. Mieux vaut arrêter quelque chose de mauvais qui se multiple par un facteur deux tant que le résultat est de 4, 8, 16 ou même 128 que d’encore attendre quelques jours et de laisser la valeur atteindre 1.048.576.
Reste que, tôt au tard, aux Etats-Unis déjà mais aussi ailleurs, se posera la question du rapport entre le coût économique et les gains de santé publique et, une fois mis en place les programmes de lutte contre l’épidémie de Covid-19 et de sauvetage économique, les gouvernements devront définir leurs stratégies de sortie de crise. Les dégâts économiques résultant des blocages sont tels qu’ils ne peuvent pas, selon l’auteur de l’étude, se prolonger pendant plus d’un mois ou deux.
Quand et comment sortir de la crise ?
Le concept clé est simple. Le nombre de personnes supplémentaires infectées par chaque personne contaminée par le Covid-19 (son taux de reproduction R) est estimé entre 2 et 3. L’objectif des mesures de confinement strict serait de ramener ce taux R en dessous de 1.
Une fois ceci réalisé, le virus du Covid-19 n’aura pas disparu, mais il sera contenu et de même, le nombre de cas s’étant stabilisé, le risque d’un pic catastrophique qui submerge le système hospitalier. Les contrôles peuvent alors être assouplis et viser à simplement maintenir un R stable à une valeur inférieure à 1 jusqu’à ce que l’immunité collective, un vaccin ou un traitement efficace éradiquent le problème.
Dès que le taux R tombe à une valeur inférieure à l’unité, il faudra quantifier le coût économique des mesures prises pour lutter contre le virus et en supprimer le plus grand nombre possible, en particulier les plus coûteuses, tout en restant raisonnablement sûr de maintenir R sous 1.
L’étude dont question répartit les types de mesures en quatre catégories. Les mesures de la première catégorie devraient rester en place le plus longtemps ; celles de la catégorie 4 devraient être supprimées en premier lieu ; les mesures des catégories 2 et 3 feront l’objet de décisions qui varieront suivant les juridictions et les circonstances. Voici ces quatre catégories :
Catégorie 1 : Mesures à fort impact à faible coût
• Tests de dépistage
• Traçage des contacts
• Lavage des mains, hygiène publique
Catégorie 2 : Mesures à fort impact avec un coût substantiel mais modéré
• Restrictions sur les rassemblements au-dessus d’une certaine taille
• Restrictions de voyage
Catégorie 3 : Mesures à impact faible à moyen à coûts élevés
• Interdiction des congrès
• Interdiction des événements sportifs
• Fermeture des clubs
Catégorie 4 : Mesures à fort impact avec des coûts insoutenables
• Fermeture des écoles et universités
• Fermeture des bars et restaurants
• Fermeture de la plupart des services et entreprises non essentiels
• Confinement à domicile
La bonne nouvelle est qu’un confinement social strict devrait très rapidement contribuer à réduire, selon l’auteur de l’étude, le taux de propagation du virus.
Il sera intéressant d’observer l’évolution de la situation relative au Covid-19 en Suède, qui a adopté des mesures beaucoup moins draconiennes que le reste de l’Europe, et, à terme, de s’interroger sur les carences politiques et autres défaillances qui nous ont amenés là où nous en sommes.
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Il est souvent question de Singapour au sujet de la lutte contre le Covid-19. La République de Singapour peut-elle, d’une manière générale, servir d’exemple à l’Occident ? Un éminent économiste flamand, Rik Ghesquière, docteur en économie de l’Université de Yale aux Etats-Unis, qui occupa d’importantes fonctions au Fonds monétaire international et vécut et enseigna à l’université à Singapour, essaie de répondre à la question dans Ochtendrood in avondland, un ouvrage publié en néerlandais dont vous trouverez une double recension (en français) sur Palingénésie en suivant ce lien.
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