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La pandémie, un tournant géopolitique ?

La pandémie, un tournant géopolitique ? Posted on 9 mai 2020Leave a comment

Quel sera l’impact géopolitique de la pandémie de Covid-19 ? La question fait l’objet d’un rapport qui a été publié le 6 mai par le bureau d’études du groupe The Economist et dont Palingénésie a pu prendre connaissance.

Selon ce rapport, la crise du Covid-19 accentuera les rivalités entre les grandes puissances et elle accélérera l’« orientalisation » (et la dés-occidentalisation) du monde, c’est à dire un changement de l’équilibre des puissances de l’Ouest vers l’Est.

La pandémie n’inaugurera pas un ordre mondial entièrement nouveau, mais elle changera les choses de trois manières importantes :

1) Elle fera remonter à la surface des développements qui étaient en train de se produire mais étaient passés inaperçus, tels que la manière dont la Chine a étendu son influence dans des parties du monde qui ne reçoivent que peu d’attention.

2) Elle agira comme un accélérateur des tendances géopolitiques existantes, en particulier la rivalité croissante entre les États-Unis et la Chine et le déplacement du centre de gravité économique d’ouest en est.

3) Enfin, elle pourrait être un catalyseur de changements actuellement difficiles à prévoir, tant dans le monde développé que dans le monde en développement, qu’il s’agisse de l’avenir de l’UE ou des relations entre de nombreux pays en voie de développement et la Chine.

Une nouvelle guerre froide

L’on aurait pu espérer que la crise sanitaire rapproche la Chine et les États-Unis ; c’est le contraire qui se produit, peut-on lire dans le Financial Times Europe de ce weekend. La détérioration de leurs relations ne date pas de hier, ni même de l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.

Sous la présidence d’Obama, l’administration américaine avait déjà pris le gouvernement chinois en flagrant délit de mensonge, notamment au sujet de l’installation de bases militaires sur des îles dans la mer de Chine du Sud. La défiance de la classe dirigeante américaine vis-à-vis de la Chine est devenue viscérale. Le grand quotidien financier britannique parle d’une « nouvelle guerre froide ».

Une guerre de désinformation bat son plein. La Chine a cherché à nier sa responsabilité concernant la propagation du virus qui en provient et a répandu des théories visant à semer la confusion  et à suggérer un complot à son encontre. Les États-Unis ont répliqué en désignant le virus comme étant « de Wuhan », en référence à la ville de la province du Hubei au centre de la Chine où sa présence a été décelée la première fois, et en insistant sur le fait que la Chine doit être tenue pour responsable de l’épidémie.

Comme à son habitude, Trump n’y a pas été par quatre chemins. S’adressant à des journalistes mercredi dans le Bureau ovale, il a déclaré à propos du coronavirus : « Nous avons été victimes de la pire attaque dont notre pays ait jamais souffert. C’est pire que Pearl Harbor, c’est pire que le World Trade Center. Il n’y a jamais eu pareille attaque auparavant. Et, cela n’aurait jamais dû arriver. Cela aurait pu être arrêté en Chine. Cela aurait dû être arrêté directement à la source. Et, cela ne l’a pas été. »

Peut-être s’agit-il pour l’administration américaine de détourner l’attention de sa gestion du début de la crise mais, plus encore, de souligner la supériorité morale des États-Unis en termes d’ouverture et de transparence de son régime par rapport à celui de la Chine.

« Orientalisation » du monde

Pendant que se déroulait cette bataille pour influencer l’opinion publique internationale, la Chine s’est efforcée de partager des informations scientifiques, de prodiguer des conseils médicaux et d’offrir son assistance aux pays aux prises avec la pandémie dans le monde. La Chine a ainsi opposé sa prétendue « efficacité » à contenir le virus à la manière dont la pandémie aurait été « mal gérée » par les États démocratiques occidentaux.

La Chine sortira de la crise vraisemblablement plus tôt et grandie en tant qu’acteur mondial, sur le plan politique et économique. Son influence s’accroîtra dans certaines parties de l’Afrique, de l’Europe de l’Est, de l’Amérique latine et de l’Asie du Sud-Est, estime le bureau d’études de The Economist.

Dés-occidentalisation du monde

Les retombées économiques négatives de la pandémie et des mesures de lutte contre la crise qui en résulte risquent, par contre, de se prolonger dans les économies matures d’Europe et des Etats-Unis, d’autant plus, observent les analystes de The Economist, que les mesures monétaires de soutien aux entreprises et aux ménages seront difficiles à inverser.

Si tel s’avère le cas, cela perpétuera l’ère de la facilité monétaire et de la dépendance à l’égard de la dette. Cela entraînera des années de croissance plus lente et cela augmentera les risques de crise de la dette souveraine.

Le leadership mondial des États-Unis continuera à s’éroder. La politique de « L’Amérique d’abord » de Donald Trump avait déjà initié un retrait de la scène mondiale et une diminution de la puissance globale des Etats-Unis, bien qu’il soit incontestable que ces derniers conservent encore l’hégémonie mondiale compte tenu de leur économie et de leur poids militaire.

L’Union européenne affaiblie

L’UE sortira affaiblie de la crise. Son incapacité à formuler un plan d’action paneuropéen face à la crise et la tendance des États membres à prendre soin de leurs propres citoyens ont porté un coup dur à l’UE. Les États membres n’ont pas agi de concert ; ils ont réagi unilatéralement. Ils ont bouclé leurs frontières, suspendu la libre circulation, interrompu les liaisons de transport, sans qu’il n’y ait eu la moindre coordination.

À moins que les pays développés – l’Europe en particulier – ne changent de cap et ne poursuivent une trajectoire économique radicalement différente après la crise, l’écart entre un Ouest à croissance lente et un Est économiquement dynamique se creusera, conclut le rapport de The Economist.

C’est en faveur d’une trajectoire économique radicalement différente, pour plus de libéralisme, plus de capitalisme et plus de démocratie, que plaidait Palingénésie dans l’article sur le monde d’après, lequel anticipait en quelque sorte sur les conclusions du rapport de The Economist.

Que l’on ne se berce toutefois pas d’illusions sur les capacités d’imagination et la volonté économique et politique des grands sachants qui nous dirigent et de leurs électeurs.

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De l’Europe, il est aussi question dans On vous trompe énormément – L’écologie politique est une mystification.

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