Ce dont le monde d’après la crise sanitaire aura besoin, ce n’est pas d’encore plus d’Etat, mais de plus de liberté et de démocratie ; ce n’est pas d’irresponsables donneurs de leçons « qui ne dormiraient pas sous les ponts qu’ils auraient conçus », mais d’entrepreneurs.
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Comment eussions-nous pu penser qu’il en fût autrement ? Tout ce qui nous arrive, la faute en est au capitalisme et au libéralisme, confondus dans un même opprobre.
L’impéritie (et plus…) des gouvernements fût-elle ce qu’elle est (voir en ce qui concerne la Belgique l’article en première page de l’hebdomadaire PAN du 1er mai) et le confinement s’apparentât-il à une tyrannie à l’état pur, c’est le capitalisme qui est qualifié de « sauvage » (par un ministre-président socialiste) et le (néo)libéralisme de « décérébrant » (par un philosophe et ancien chef de file d’une liste écologiste aux élections européennes), parmi les divagations d’autres charlatans sur les mêmes thèmes. Le « monde d’après » promet – d’être du pareil au même.
Les agitateurs d’intentions, d’idées, de notions, les politiciens, les philosophes et les économistes qui cogitent dans leurs bocaux et n’ont jamais créé, et encore moins géré, une entreprise, ni n’ont cherché à s’y faire embaucher et se sont toujours contentés de dire aux autres comment il faut faire – tout en s’en abstenant eux-mêmes –, ces parasites sont malheureusement beaucoup plus nombreux que les entrepreneurs, ces parias. Or, c’est surtout de cette dernière « engeance-là » dont on aura besoin pour reconstruire le « monde d’après ».
Quand un philosophe parle d’un « néolibéralisme obtus à la Hayek », ne doit-on pas légitimement se demander s’il a lu la moindre page de l’oeuvre de l’illustre penseur libéral britannique d’origine autrichienne et fondateur de la Société du Mont-Pèlerin ? Le néolibéralisme est un concept à tiroirs multiples et sans fond qui signifie tantôt ceci pour un économiste, tantôt cela pour un psychiatre, tantôt tout autre chose encore pour un écrivain, une sorte de fourre-tout insondable où chacun entasse ses frustrations à propos de la société dans laquelle nous vivons.
Obtus – un philosophe ancien chef de file écologiste devrait savoir de quoi il parle –, Hayek ne l’est pas. Le libéralisme, c’est Adam Smith, Hume, Locke, Milton, le rejet de l’absolutisme de droit divin, mais pas seulement ; il représente aussi, écrit Hayek dans La route de la servitude, les caractéristiques de la civilisation occidentale telle que fondée à partir de la Grèce antique, de Rome, du christianisme, il intègre un individualisme hérité d’Erasme, Montaigne, Cicéron, Périclès, Thucydide, et puise sa vitalité dans le commerce partout où ce dernier s’est affranchi du despotisme.
La question fondamentale que pose Hayek est : vaut-il mieux qu’un gouvernement se limite à créer les meilleures conditions permettant à chacun d’utiliser ses connaissances et de mener sa vie comme bon lui semble, ou le fonctionnement rationnel de la société requiert-il une organisation centrale de toutes nos activités, conformément à un plan délibérément élaboré par quelques-uns en fonction de leurs propres objectifs et projets ? Le philosophe écolo répond à cette question fondamentale qu’il faut « réparer le vivant » et « refuser que chacun puisse dans son coin décider de son mode de vie ».
Hayek n’est nullement partisan du laisser-faire, bien au contraire, il estime que l’exercice de la libre entreprise présuppose une armature juridique solide, mais cette dernière doit être impersonnelle afin de favoriser, non un groupe d’intérêt particulier, mais la concurrence, la seule méthode efficace pour guider l’activité économique, car une vue compréhensive de l’ensemble de la société, de ses besoins et de ses valeurs diverses, partielles, incompatibles, se heurte aux limites épistémologiques de notre connaissance.
Les collectivismes diffèrent entre eux en fonction de la nature des buts qu’ils poursuivent, mais tous diffèrent du libéralisme en ce que, par définition, socialisme, communisme, écologisme, tout collectivisme, quelle qu’en soit la finalité, n’offre aucune place à l’individualisme et, dès lors qu’il impose ses propres jugements d’ordre moral (que ces jugements soient moraux ou immoraux, que l’on songe au cas du national-socialisme !), le collectivisme débouche nécessairement sur une pensée unique et un régime totalitaire.
Ceci conduit tout naturellement à aborder la question du capitalisme présumé sauvage par des socialistes en panne d’audience et d’imagination. Restons avec ce grand penseur que fut Hayek, qui nous en donne une définition claire et en précise la portée : « Si le mot « capitalisme » signifie un système de concurrence basé sur la libre disposition de la propriété privée, il faut se rendre compte que seul un tel système permet la démocratie. Lorsque le régime est dominé par une doctrine collectiviste, la démocratie finit inévitablement par se détruire elle-même. »
Cette définition du capitalisme a déjà le mérite d’en exclure ces magnats de la finance et de l’industrie qui gèrent l’argent ou la propriété des autres, s’enrichissent obscènement et confèrent au capitalisme l’image détestable et fausse que s’en fait un certain public et que cultivent les collectivistes pour discréditer l’individualisme et en alléguer l’égoïsme dans un amalgame fumeux.
De fil en aiguille, nous en revenons à la démocratie, laquelle suppose une égalité formelle devant la loi (l’état de droit). Certes, cette égalité-là ne conduit pas à l’égalité matérielle. Comment pourrait-on arriver à des résultats identiques avec des gens différents si ce n’est en les traitant différemment ? La question est ici : en quoi l’inégalité matérielle à l’arrivée serait-elle immorale si tous se trouvent au départ sur la même ligne ? Sauf à avoir absorbé des produits illicites ou pris un raccourci, un athlète mériterait-il l’opprobre pour avoir dépassé ses concurrents dans quelque concours ? Et, en quoi serait-ce différent, le sport devenant de plus en plus souvent une occupation lucrative, voire un métier, plutôt qu’un simple passe-temps ?
Si la crise sanitaire comporte une indication, c’est bien que la confiance dans le pouvoir magique des Etats est mal placée et que plus d’Etat n’est pas le remède aux impérities de l’Etat. Pour reconstruire le monde d’après et réaliser la prospérité du plus grand nombre, ce n’est pas de plus d’Etat dont nous avons besoin, mais de plus de libéralisme, de plus de capitalisme et de plus de démocratie.
Les Romains obligeaient leurs ingénieurs à dormir avec femme et enfants sous les ponts qu’ils avaient conçus. Suggérons à nos ingénieux politiciens, philosophes et économistes en vase clos, que leurs monomanies ont déconnecté de la réalité, d’appliquer leurs idées à eux-mêmes, de se transformer en entrepreneurs, de vivre et faire vivre les leurs des fruits de leurs entreprises plutôt que de se contenter de vivre aux dépens de celles des autres et de leur faire la leçon en plus. Les parasites vaquant à leurs affaires, ô miracle, euphorie, relance économique et bonheur universel – le choix fût-il pour certains de ne rien faire – seront au rendez-vous !
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De capitalisme sauvage, il est question dans On vous trompe énormément – L’écologie politique est une mystification. Mais, c’est de capitalisme de connivence, voire carrément mafieux, qu’il s’agit, d’un prétendu capitalisme dans lequel quelques-uns s’enrichissent éhontément et qui n’a bien sûr rien – alors strictement rien ! – à voir avec le capitalisme tel que Hayek le conçoit.
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